Pour Roxane

Le ciel était affreusement ensoleillé ce jeudi 14 octobre. Nous étions nombreuses et nombreux, sonné-es, tristes et démuni-es, pour dire un dernier au revoir à Roxane. Une partie de celles et ceux que Roxane avait touché-es, aimé-es, côtoyé-es, aidé-es, soutenu-es tout au long de sa vie – son affreusement trop courte vie – étaient présent-es. Si toutes et tous avaient été là, c’est bien plus que la plus grande des salles du cimetière de Saint-Georges qu’il aurait fallu.

Autour du cercueil, sa famille, ses ami-es, les autorités de la Ville de Genève, des collègues, ses camarades, des gens de la rue, du pavé, de la nuit, de l’oubli et de l’ombre, des travailleuses et travailleurs de Caritas, de Quai 9, de SOS Femmes, du Capas, de toutes les associations où Roxane avait œuvré et travaillé sans compter, avec tellement d’humilité, de gentillesse et de professionnalisme.

L’amitié, l’énergie, les idées et l’enthousiasme de Roxane ont toujours été mis au service des plus précaires et des plus fragiles. Remplie de compréhension pour chacun-e, elle ne « faisait pas son travail », elle l’incarnait avec son sourire malicieux, son rire généreux et une exigence incessante. Pas de calcul chez elle, ni de jugement : la loi du cœur et de l’engagement, toujours.

Sa mort laisse un vide énorme, une béance à couper le souffle. Jeune, généreuse et humble, elle était un modèle. On croyait l’avoir pour toujours avec nous. La vie nous envoie une baffe et nous vole. L’injustice est incommensurable, la révolte légitime. Elle avait tant à recevoir et à donner, tant à aimer encore. Pourquoi elle ?

Un héritage nous revient, celui de poursuivre son combat contre les inégalités sociales et toute violence broyant des vies. Il nous échoit de faire quelque chose de grand, de beau et de créatif contre ce qui écorche les êtres humains, pour être digne d’elle. Il nous revient d’être heureuses et heureux, pour elle.

Ce jeudi 14 octobre, Roxane nous a réuni-es une dernière fois autour d’elle. Son souve-nir et son exigence de justice demeurent à jamais.

Repose en paix Roxane.
Nous te pleurons.
Nous te prions aussi.


Hommage à Roxane Aubry

Lydia Schneider Hausser
Présidente du Parti socialiste genevois

Texte partagé lors de la cérémonie d’adieu à Roxane, le jeudi 14 octobre 2021

Roxane ma camarade,
notre camarade,

Sur la base des récits des travailleuses et ex-travailleuses du sexe de SOS Femmes, Roxane écrivait dans son travail de master : “les ex-travailleuses du sexe ne sont pas, à nos yeux, à appréhender en tant que « victimes », mais à contrario, en tant qu’« expertes » de leur situation sociale, économique et professionnelle. Adopter une telle perspective permet de leur redonner un droit à la parole, de penser et d’agir quant à leur condition d’ex-travailleuses du sexe. En effet, celles-ci ne sont pas uniquement déterminées par l’exercice du travail du sexe en lui-même, mais elles s’inscrivent dans une appréhension des parcours de vie qui revêt leur condition de femmes, de migrantes, de travailleuses, de mère de famille, mais aussi d’actrices socio-économiques.”

Donner véritablement une place aux personnes discriminées, rabaissées, cabossées par leur environnement… penser l’humain, les droits humains et ne pas s’arrêter à nos a priori, nos habitudes ou même nos lois…telle était l’exigence que Roxane posait par rapport à son implication professionnelle, sociale et politique…Telle était l’exigence qu’elle stimulait fortement chez ses collègues et nous devons aujourd’hui encore la remercier pour cela.

Lorsque Roxane m’a parlé d’adhérer au Parti socialiste, cela n’a pas été une surprise, cela a surtout été un plaisir, une chance pour le PS… Une chance encore plus grande lorsqu’elle a décidé de se présenter pour le Conseil municipal de la Ville de Genève en 2019… Le score qu’elle a obtenu montre qu’elle avait fait le bon choix.

Cette détermination quant à ses positions, ses engagements associatifs et politiques s’appuyaient plus que certainement sur ses doutes et ses réflexions qu’elle partageait lors de débriefs, de discussions mémorables, d’apéros, de soirées … et ce fut un grand privilège pour moi d’avoir pu en partager un bon nombre.

Roxane, je sais maintenant que tu as cheminé jusqu’à l’extrême pour rester avec nous. Je t’assure que je, que nous ferons nôtre cette exigence de lutter contre l’injustice sociale, la stigmatisation, de lutter pour donner le droit à chacune et chacun d’avoir sa place dans notre monde.

Pour cheminer encore un petit bout avec la luminosité et l’énergie qu’apportait Roxane je vous suggère une réflexion :

« Chaque mot, chaque être qui vient frapper à ta porte, t’apporte son énigme. Si tu es disponible, il t’apportera sa force. »